Le Yoga, discipline millénaire, est né en Inde où il a constamment évolué et foisonné au cours de son histoire. Depuis toujours, il connaît différents courants, certains rattachés à une religion, d’autres non. Sa transmission vivante a été la source d’approches différentes. Il n’y a donc pas « le Yoga » mais des chemins du Yoga.
Représentant tantôt des pratiques, tantôt un état à atteindre, il est défini de nombreuses manières. Nous pouvons présenter la définition de l’état de Yoga de Patanjali, compilateur du texte de référence du Yoga, le Yoga sūtra (environ 2 s. avant JC à 4 s. après JC) :
Le Yoga est la cessation /l’apaisement des fluctuations/du tourbillon des activités psychiques.
En occident, les formes de pratiques de Yoga les plus répandues sont des déclinaisons du Hatha-Yoga (il commence à apparaitre à la fin du 1er millénaire) qui utilise majoritairement des exercices corporels comme base de travail, associés au souffle. Les pratiques consistent en un enchaînement qui peut être composé de postures (Asanas), d’exercices du souffle (Pranayama), d’exercices de concentration (Dharana) et de méditation (Dhyana) – celle-ci est souvent pratiquée dans des séances à part.
Le Viniyoga est une manière d’enseigner le Hatha-Yoga
Viniyoga
Un enseignement adapté à chacun
Être Yoga s’appuie sur l’enseignement du Yoga formalisé et transmis par T. Krishnamacharia à Chennai (Madras) dans le sud de l’Inde. A la fois érudit dans toutes les branches de la philosophie Indienne et reconnu comme l’un des plus grand yogi du 20e siècle il a fortement contribué à ouvrir le Yoga au plus grand nombre. Enseignant aux enfants, aux femmes, aux personnes âgées, aux Indiens, aux occidentaux… il affirmait le principe du Viniyoga : le yoga peut être enseigné à tous mais doit être adapté à chacun, selon sa constitution physique, mentale, son histoire personnelle et sa culture. Avec son fils TKV Desikachar, il a formé de nombreux professeurs qui, à leur tour, enseignent le Viniyoga en France et dans le monde.
Cette démarche pédagogique, permet de construire librement les séquences. Sont associées postures (asanas), pratiques du souffle (pranayama), de concentration et de méditation à partir d’une écoute et d’une fine attention du professeur envers son ou ses élèves.
Le parcours de T. Krishnamacharia
Au début du XXe siècle, alors que les enseignements traditionnels indiens étaient surtout connus et transmis par des ascètes isolés, T. Krishnamacharya est l’un des acteurs qui insuffla une nouvelle vie à l’enseignement du Yoga pour l’offrir au monde moderne.
Descendant d’une lignée de maîtres spirituels T. Krishnamacharya (1888 – 1989) commence l’étude du Yoga avec son père qu’il va perdre à 10 ans. C’est avec son grand-père qu’il poursuivra ses études et va acquérir une connaissance très complète des philosophies indiennes dans différentes universités.
A 26 ans, il se rend en Himalaya où son maître Tibétain va l’accueillir dans sa famille et lui enseigner toutes ses connaissances du Yoga pendant huit ans.
A 36 ans, Il va devenir le professeur de Yoga du Maharaja de Mysore et fonder son école. Ses conférences, ses démonstrations et sa pratique thérapeutique lui ont permis de raviver en Inde la flamme du yoga.
A 62 ans T. Krishnamacharya fonde une nouvelle école à Madras. Puis son fils T.K.V Desichakar, devenu un professeur de Yoga respecté, crée le Krishnamacharya Yoga Mandiram qui existe toujours aujourd’hui.
Yoga sur chaise
Il n’y a pas un Yoga pour tous, mais un Yoga pour chacun
La pratique du Yoga sur chaise, s’adresse à toute personne ayant perdu une autonomie (relative ou importante) dans certains mouvements à cause d’une pathologie ou d’un accident de la vie. Ce peut-être aussi une maladie (Parkinson, sclérose en plaques, maladies auto-immunes, accident vasculaire cérébral) ou bien encore le grand âge sans oublier les personnes présentant des troubles psychiques.
Sur la chaise, et dans certains cas sur le tapis, par la pratique des postures, nous ne cessons d’approfondir la conscience de l’unité du corps. Nous découvrons des niveaux de plus en plus subtils. Pour ce faire, les postures les plus simples sont les meilleures. Elles ne sont souvent simples qu’en apparence. L’action se fait de la périphérie vers le centre. La périphérie, c’est les membres, le bassin et la tête. Nous agissons sur la colonne pour libérer notre énergie de vie et de ce fait, créer les conditions favorables au fonctionnement de notre système nerveux central (moelle épinière, tronc vertébral, cerveau) qui coordonne, régule, unifie nos principales fonctions. La pratique consiste à enlever les obstacles au bon fonctionnement. Il faut pratiquer au rythme du corps. Pas au rythme du mental. Le rythme du corps est infiniment lent par rapport au rythme du mental. Pour trouver ce rythme, suivez une respiration naturelle consciente. Se sentir bien dans la posture (pas forcément aisé), avoir envie d’y rester, c’est la qualité de l’immobilité et sa durée qui donne les effets des asanas. Développer le ressenti, les sensations et de ce fait vivre au présent dans son maximum autorisé : « Vivre dans le présent, complètement, totalement, c’est vivre avec ce qui est, avec l’actuel, sans le condamner, ni le justifier. Tout problème vu dans la clarté est résolu » (Krishnamurti).
Si la pratique du yoga sur chaise ou fauteuil s’est développée fortement, c’est qu’elle est dans l’air du temps : la durée de vie augmente avec une prise de conscience plus fine sur « se faire du bien ». Il faut que le corps soit à l’aise pour que l’âme s’y plaise, même avec des situations délicates et des pathologies importantes. Le lien corps-esprit est une donnée de base dans la pratique du yoga. L’adaptation est une notion clef qui permet à tout un chacun de pratiquer. Changer le regard sur la vieillesse et le handicap a été le moteur du développement de cette pratique. Depuis 2008, elle s’effectue dans les maisons de retraite, c’est là qu’elle a vu le jour … mais la bienveillance sur l’adaptation a permis que cette pratique puisse s’installer dans des quartiers et dans des institutions de soin et de rééducation. Ce changement de regard a interpellé de nombreux enseignants de yoga qui ont suivi la formation mise en place depuis 2014 afin que le yoga puisse être pratiqué par tout un chacun et qui ont favorisé la mise en place d’une association nationale créée en 2018 pour que le plus grand nombre puisse en profiter. Cette association s’appelle RVHY (recherche en yoga par la pratique du yoga sur chaise).
Cette pratique permet même à un âge avancé (80 et plus) de bénéficier des bienfaits du yoga. En hatha yoga, tous les mouvements sont proposés, jamais imposés. Partir de là où nous en sommes avec ce corps que l’on est, et que l’on a, est motivant. Se redresser, c’est s’ouvrir, s’ouvrir, c’est se redresser. L’humilité et la bienveillance sont une bonne base pour progresser, même si les progrès restent infimes. Eviter la dégradation et rester dans l’humilité, car l’humilité, c’est être affranchi de l’importance de soi. Nous sommes en yoga.
La thérapie et le yoga
Si le yoga n’est pas une thérapie, il s’avère thérapeutique et c’est tant mieux. A l’heure où fleurissent des quantités de propositions sur le bien-être, il faut rester conscient d’aller vers le bien-être mais nous devons faire appel au discernement et plutôt renforcer dans les écoles de yoga les notions d’anatomie et de physiologie. La transmission n’est pas uniquement l’enseignement, c’est aussi une compréhension. Mais quelle compréhension ? Le yoga est un engagement ; et si la transmission est un enseignement, il est aussi plus que cela, car la transmission passe par l’étonnement, la profondeur et le ressenti pour aller vers une compréhension de ce que je suis au fond de moi, ce qui me permet de discerner et d’agir corps et âme dans la simplicité ; c’est aller vers l’Amour. (Jeannot Margier)